9 février 2021

D’où vient la Saint-Valentin ?

Par Jean-Sébastien Marsan

(Article publié à l’occasion de la sortie de l’ouvrage Histoire populaire de l’amour au Québec, tome II.)

Dès l’Antiquité, le mois de février a été associé à l’amour et aux fiançailles.

Dans la Rome antique, le dieu de la fertilité, Lupercus, était fêté le 15 février. Çà et là dans l’Europe médiévale, des fêtes populaires se déroulaient lors des premiers dégels, vers la mi-février, lorsque la nature sortait de sa torpeur. Le peuple soulignait alors son plaisir de pouvoir enfin s’évader des maisons après les longs mois d’hiver.

Les historiens et spécialistes ignorent où et quand ces fêtes ont vu le jour (certains soutiennent que leur origine remonte aussi loin qu’au XIIe siècle), mais il est certain que ces fêtes comportaient des jeux, des danses et des tirages au sort qui permettaient aux célibataires de flirter, de séduire.

Le 14 février n’était pas encore une date charnière. Une croyance voulait que les oiseaux s’accouplent ce jour-là, mais des fêtes se déroulaient aussi le 13 février et à d’autres moments.

La plupart de ces occasions de rencontre se déroulaient autour d’un feu ou d’un foyer, avec divers jeux symboliques associés aux braises et aux cendres — le feu symbolisant la purification, les cendres la renaissance. Les Valentins et Valentines étaient souvent appelés « fiancés des cendres ». (Il y aurait d’ailleurs un lien entre « fiancée des cendres » et le personnage de Cendrillon. L’histoire de Cendrillon que nous racontons aujourd’hui aux enfants provient du célèbre conte de Charles Perrault, écrit en 1697, et Perrault connaissait peut-être la tradition populaire médiévale qu’il aurait délibérément modifiée.)

Carte de Saint-Valentin, vers 1910

Il existait aussi en février des superstitions qui laissaient croire aux célibataires qu’ils allaient bientôt convoler en justes noces. Par exemple, les Wallons se regroupaient autour d’un gros feu au milieu duquel ils avaient planté une perche surmontée d’un vieux balai. La perche brûlait et le balai tombait sur l’assemblée, désignant une jeune femme ou un jeune homme assuré de se marier en premier.

Mais pourquoi dit-on « Saint-Valentin » ? Qui était ce saint ?

Dans l’histoire du christianisme, plusieurs religieux surnommés Valentin ont mérité la canonisation pour leurs talents de guérisseurs. Plus de 20 personnalités différentes, selon des spécialistes !

L’Église a semble-t-il géré, rationalisé ses nombreux saints Valentin en insistant sur un personnage ayant vécu en Italie au début de l’ère chrétienne et en occultant les autres.

Le plus connu de ces saints est ainsi un prêtre italien décapité en 273 après Jésus-Christ sur l’ordre de l’empereur romain Claude II le Gothique. Une légende veut que ce pieux Valentin ait miraculeusement guéri une fille de la cécité tandis qu’il était en prison et qu’il soit aussi tombé amoureux.

Mais il y eut un autre saint Valentin et prête italien décapité à Rome, en 269 ou en 280 après J.-C. selon les sources. Ce martyr aurait lui aussi rendu la vue à une jeune fille, ce qui le place en concurrence avec son homonyme.

De nombreuses légendes ont circulé sur ces deux personnages. Des historiens croient que ces deux saints Valentin guérisseurs et décapités ne sont qu’une seule et même personne. La plupart des dictionnaires et encyclopédies que l’on peut consulter aujourd’hui ne mentionnent que le saint martyrisé sous Claude II le Gothique, certains ouvrages citent les deux saints.

Le saint ou les saints Valentin ont peu en commun avec la rencontre amoureuse, outre la légende et le fait que tout bon chrétien prêche l’amour universel. Alors quel lien avec une fête des amoureux ?

Il existait, au début du Moyen Âge, un culte à saint Valentin. L’Église a tout bonnement décrété que saint Valentin sera désormais le patron des amoureux. La date retenue pour la fête de ce saint, le 14 février, reposerait sur une croyance médiévale, amplifiée par la littérature courtoise, voulant que les oiseaux s’accouplent ce jour-là. Les oiseaux, symboles d’amour angélique, correspondaient bien à l’imagerie chrétienne.

Il est aussi permis de croire que l’Église cherchait à contrôler les fêtes profanes, ces joyeux rassemblements de célibataires à la mi-février.


Ces informations proviennent d’encyclopédies ainsi que d’un ouvrage exclusivement consacré aux origines de la Saint-Valentin, Valentines et Valentins, publié en 2004 par une association française, Le Cercle d’Études Mythologiques. Ce livre reproduit des textes anciens et dévoile des recherches alors inédites.